Projet de loi de finances 2025 : L’UNSA éducation interpelle les groupes parlementaires

La secrétaire générale de l’UNSA éducation, Morgane Verviers, s’est adressée aux présidentes et présidents des groupes parlementaires de l’assemblée nationale et du sénat pour les alerter sur certains points du PLF 2025 qui posent problème pour notre fédération. Pouvoir d’achat, inclusion, financement des établissements privés, GIPA, suppressions de poste, santé scolaire : Découvrez ici sur quelles thématiques l’UNSA éducation a voulu interpeller la représentation nationale avant le vote du budget.

Madame la présidente, monsieur le président,

Dans les prochaines semaines, votre groupe parlementaire devra se positionner sur le vote du projet de loi de finances pour l’année 2025. Pour l’UNSA éducation, fédération de 23 syndicats de métiers des champs de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de la jeunesse et sports et de la culture, largement représentative auprès de ces ministères, ce projet de loi de finances 2025 n’est pas à la hauteur des défis que doit relever notre service public d’éducation et de formation pour réduire les inégalités de destin, pour permettre aux jeunes de construire leur avenir et pour assurer la cohésion de la société. Les personnels sont fiers de s’engager au quotidien pour le service public, mais la précarité croissante, la détérioration des conditions de travail et la stagnation du pouvoir d’achat pèsent lourdement sur le fonctionnement des écoles, des collèges, des lycées, des universités, des établissements de recherche ou de culture, des services, en territoire ou au ministère où ils s’investissent sans compter, dans des ministères qui sont les plus « sous-administrés » de notre service public.

Nous voulons alerter votre groupe parlementaire sur plusieurs points cruciaux du projet de loi de finances qui, à notre sens, doivent absolument évoluer lors de l’examen du texte par les deux chambres : 

Le point d’indice sur lequel est basé la rémunération des personnels de la fonction publique doit être revalorisé. Au minimum à hauteur de l’évolution de l’indice des prix à la consommation. Il est urgent de procéder à un rattrapage de la perte du pouvoir d’achat due à l’inflation qui s’établissait à 5,2% en 2022, 4,9% en 2023 et 1,8% en 2024. 

Le dispositif de la « Garantie Individualisée du Pouvoir d’achat » (GIPA) ; qui permet aux fonctionnaires de bénéficier d’une compensation de leur baisse de rémunération durant les quatre dernières années, n’est pas reconduit pour 2025. Ce dispositif n’apparaît plus dans le budget 2025. Sa disparition est catastrophique pour des personnels déjà précarisés par l’inflation.

Ces mesures pourraient être en partie financées en supprimant le Service National Universel, gabegie qui déconcerte toutes celles et tous ceux à qui la bonne tenue des comptes publics tient à cœur. Pointé pour son coût par la Cour des comptes et son manque d’objectifs clairs, ce dispositif met en tension les personnels du champ jeunesse et sports, au détriment de leurs autres missions bien plus utiles à la nation. Ces moyens seraient bien plus efficaces dans d’autres dispositifs pour favoriser la mixité sociale et l’apprentissage de la citoyenneté.

Le budget alloué aux bourses étudiantes sur critères sociaux, dans le programme « vie étudiante » de l’enseignement supérieur et de la recherche prévoit une baisse inconséquente en 2025 de plus de 100 millions d’euros. Alors que la précarité étudiante connaît une hausse importante, ce budget doit être revu à la hausse pour permettre aux étudiants français de vivre dignement. L’UNSA Éducation rappelle qu’elle revendique la mise en œuvre d’une allocation universelle d’études pour poursuivre la démocratisation de l’enseignement supérieur.

Le sous-financement des établissements d’enseignement supérieur est devenu chronique et des moyens doivent être dégagés pour leur redonner des marges de manœuvre. La hausse démographique des étudiants, l’inflation et les coûts de gestion accrus dus aux prix de l’énergie ont conduit les établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche à ne pouvoir fonctionner autrement qu’on mode dégradé.

L’UNSA Éducation tient à attirer l’attention des parlementaires sur le crédit impôt recherche, la plus importante « niche fiscale », qui a un rendement médiocre d’après le conseil d’analyse économique et la commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation. Les 100 plus grandes entreprises du dispositif, qui représentent 0,3 % du total des entreprises éligibles, bénéficient de 33 % de cette dépense fiscale. Le CIR doit être redirigé vers les PME, en abaissant le plafond des dépenses éligibles et les fonds dégagées doivent être employés pour financer la recherche publique. 

Les établissements publics sont plus mal lotis que ceux du privé. C’est notamment le cas pour l’enseignement agricole, quand des établissements privés bénéficient de subventions plus ou moins déguisées de la part de collectivités territoriales alors que 30 % des établissements publics sont en difficulté. L’avenir du modèle agricole de notre pays se joue dans ces établissements. Cette situation où le public paie un plus lourd tribut que le privé en matière de suppressions de postes se retrouve aussi dans l’éducation nationale.

Sous prétexte de baisse démographique, là où il faudrait une gestion de long terme pour améliorer les conditions d’apprentissage dans les classes les plus surchargées d’Europe, le gouvernement engage des milliers de suppressions de postes dans le premier degré. L’UNSA Éducation vous alerte sur le plafond d’emploi dont la baisse aura un effet dévastateur sur les moyens de remplacement, avec des conséquences très concrètes pour les familles dans l’année à venir. 

Choc des savoirs et « prépa lycées » : des moyens fléchés sont dégagés par le ministère de l’éducation dans le second degré pour des dispositifs injustes et inefficaces. Notre fédération, qui a déposé un recours au conseil d’état contre la mise en place de groupes de niveaux contraire au principe d’autonomie des établissements dans leur organisation pédagogique, vous propose de dénoncer ce fléchage de moyens vers les groupes de niveaux des collèges et la mise en œuvre de « prépa lycées » qui changent la nature du diplôme national du brevet, devenu couperet, et vont renforcer les inégalités sociales en matière d’orientation.

De la même manière, le ministère de l’éducation veut recentrer les moyens alloués dans le dispositif PACTE(rémunération contre missions supplémentaires) sur le remplacement de courte durée. Alors que l’an dernier ces moyens du PACTE avaient remplacé les moyens auparavant utilisés pour financer des projets pédagogiques en établissement. La revalorisation des métiers de l’éducation nécessite des moyens forts, à la hauteur de la pénurie croissante d’enseignants dans notre pays et de l’ambition de notre système éducatif d’attirer les meilleurs étudiants. Nous vous proposons ainsi de dénoncer ce recentrage. Des enveloppes doivent être à nouveau dégagées pour valoriser le travail d’équipe des équipes pédagogiques, qui est un levier important pour l’attractivité du métier enseignant. Une rémunération Socle doit être créée pour les assistants d’éducation (AED) qui participent largement à la vie scolaire des établissements.

La qualité de notre système éducatif passe largement par l’accès à la formation continue pour les personnels éducatifs. Les moyens dégagés dans ce PLF ne permettent pas d’assurer la formation de personnels spécialisés, notamment pour l’inclusion, et de répondre aux besoins du terrain pour accompagner les élèves. Et ce alors que le nombre de jours de formation par agent est plus bas que dans les autres ministères et que dans les autres pays.

L’inclusion de tous les élèves au sein de l’École est une priorité politique rappelée régulièrement. Pourtant, la mise en œuvre des engagements présidentiels de la conférence nationale du handicap pour la création des pôles d’accompagnement à la scolarité, et plus largement pour réussir l’inclusion en accompagnant mieux les personnels n’est pas assurée financièrement dans ce projet de loi de finances. Ni en manière de création de postes d’AESH, ni pour améliorer leur rémunération qui pose problème pour stabiliser ces personnels. Nous comptons sur votre groupe politique pour remettre en cause cette situation qui est un enjeu majeur pour les élèves, pour les familles et pour les personnels.

Le budget sur lequel vous allez voter n’est pas assez transparent ni ambitieux en matière de financement de la santé scolaire. Les documents dont vous disposez n’indiquent pas le nombre de médecins scolaires et d’infirmières de l’éducation nationale qui pourront mettre en œuvre des actions de prévention et ne permettent d’entrevoir ni créations et suppressions de postes, ni d’éventuelles hausses de rémunérations. Il en est de même pour l’accompagnement social des élèves : le nombre actuel de postes ne permet pas de répondre aux situations de fragilité dans les établissements. Idem dans les universités où la charge de travail explose et où l’indemnité des assistants de service social est moindre que ceux affectés en établissement scolaire. Nous regrettons l’absence de revalorisation pour ces personnels dans l’ESR.

Un certain nombre de nos métiers nécessite des déplacements. Que ce soit pour les corps d’inspection dont la mission d’accompagnement des équipes en établissement est primordiale pour la mise en œuvre de nouvelles formes d’évaluation ou pour les assistants de service social qui couvrent des zones de plus en plus larges. Nous vous engageons à remédier à la diminution de 15 % des frais de déplacement induite dans ce PLF qui viendra mettre en péril la capacité des personnels à mener à bien leur mission, en sachant que ces certains sont déjà contraints de les financer eux-mêmes.

Madame la présidente, monsieur le président, ce débat sur le budget qui s’est ouvert, dans une nouvelle configuration politique où les groupes parlementaires ont plus de poids, est aussi l’occasion de redonner tout son sens à la question primordiale des investissements collectifs pour l’avenir de notre pays. L’UNSA Éducation se tient à votre disposition pour toute précision sur les propositions que nous faisons dans cette lettre ouverte et vous prie d’agréer ses salutations distinguées.

Morgane Verviers, 

Secrétaire générale de l’UNSA Éducation

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